Aperçu des troubles du sommeil

Aperçu des troubles du sommeil

Le sommeil peut s'avérer anormal de nombreuses manières et influencer soit les épisodes nocturnes de sommeil, la vigilance diurne ou le fonctionnement et/ou le rythme du cycle veille-sommeil. Afin de juger de la complexité du domaine du sommeil perturbé, on peut simplement consulter la 2e édition de la Classification internationale des troubles du sommeil (American Academy of Sleep Medicine 2005) qui dresse une liste des différentes catégories de troubles du sommeil:

  • Insomnie (insomnie psychophysiologique; insomnie comorbide à une maladie grave)
  • Sommeil en relation avec les troubles respiratoires (apnée obstructive du sommeil, apnée centrale du sommeil)
  • Hypersomnies d'origine centrale (narcolepsie, hypersomnie due à un problème de santé)
  • Troubles du rythme circadien du sommeil (syndrome de retard ou d'avance de phase du sommeil)
  • Parasomnies (somnambulisme, terreurs nocturnes, cauchemars, bruxisme)
  • Troubles du sommeil en relation avec des troubles moteurs (dyskinésie) (syndrome de mouvements périodiques des membres dans le sommeil, syndrome des jambes sans repos)
  • Symptômes isolés et variantes normales
  • Autres types de troubles du sommeil

Parmi les troubles du sommeil les plus fréquemment rencontrés dans le contexte de la réadaptation, on compte l'insomnie, l'hypersomnie (ou somnolence diurne), l'apnée du sommeil, la narcolepsie et les troubles du rythme circadien du sommeil. Ces troubles seront présentés brièvement dans le présent texte.

L'insomnie

L'insomnie est un trouble qui revient extrêmement souvent dans les plaintes liées à la santé dans le cadre de la pratique médicale et qui pourrait être dû à une variété de facteurs, dont de graves problèmes de santé, des facteurs intrinsèques (tension somatisée, inquiétude) ou autres troubles du sommeil (mouvements périodiques des membres). Elle est généralement définie comme une difficulté à trouver (s'endormir) ou à maintenir le sommeil (resté endormi). L'insomnie est associée à d'importants problèmes de fonctionnement diurne, une diminution de la qualité de vie et un accroissement du nombre de plaintes liées à la santé (Ohayon 2002, Simon et VonKorff 1997).

Certains critères sont utilisés de façon systématique pour définir un syndrome insomniaque. Dans le domaine de la recherche, la plupart des études utilisent une combinaison de critères issus de la quatrième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (en anglais : Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders ou DSM-IV, American Psychiatric Association 2000), la Classification internationale des troubles du sommeil (CITS-2) et/ou la Classification internationale des maladies (CIM-10). Un syndrome insomniaque est habituellement défini selon les critères suivants:

  • La personne éprouve une insatisfaction liée à la quantité et la qualité de son sommeil;
  • La personne a de la difficulté à trouver et/ou maintenir le sommeil, caractérisé par un délai d'endormissement et/ou une augmentation du temps éveillé après l'endormissement de plus de 30 minutes, de même qu'une efficacité du sommeil (ratio de la durée totale du sommeil par rapport au temps passé au lit) réduite à moins de 85 %;
  • Les problèmes de sommeil se produisent plus de trois nuits par semaine;
  • La perturbation du sommeil provoque une détresse importante ou une déficience dans les domaines sociaux, occupationnels ou autres domaines de fonctionnement diurne attribués aux problèmes de sommeil.

On considère que l'insomnie est de nature situationnelle si elle dure plus d'un mois, subaiguë si elle dure entre 1 et 6 mois, et chronique si elle se manifeste pendant une période de plus de 6 mois. Il est important de remarquer qu'en raison des différences personnelles dans les besoins de sommeil, la durée totale du sommeil ne s'avère pas un bon indicateur lorsqu'on ne tient compte que de ce critère.

L'hypersomnie

L'hypersomnie est caractérisée par un sommeil nocturne prolongé et/ou une somnolence diurne excessive. La principale caractéristique de la somnolence est l'incapacité de maintenir un niveau adéquat de vigilance ou d'état de veille au cours de la journée (American Academy of Sleep Medicine 2005). Les individus au prise avec une somnolence excessive ont de la difficulté à rester éveillés et vigilants, non seulement lorsqu'ils exercent une activité plutôt calme, mais aussi dans des moments inhabituels, voire inopportuns, comme au travail, en voiture ou pendant une conversation.

La somnolence diurne excessive est souvent confondue avec la fatigue. Alors que la présence de somnolence est souvent associée à la fatigue, une sensation de fatigue ne s'accompagne pas forcément de somnolence ou de propension au sommeil. La fatigue est un état subjectif pouvant être défini comme de la lassitude, de la faiblesse ou un épuisement de l'énergie, mais il s'avère assez difficile de la mesurer de façon objective. La somnolence se rapporte aux sensations d'engourdissement physiologique, de propension au sommeil ou de vigilance réduite (Pigeon et coll. 2003) et peut être objectivée au moyen de techniques standardisées adéquates, comme des enregistrements polysomnographiques diurnes dans un laboratoire du sommeil (voir la partie sur la polysomnographie ci-dessous).

Les causes les plus communes de sommeil nocturne prolongé et de somnolence diurne excessive sont la privation chronique de sommeil, la présence de troubles du sommeil sous-jacents (apnée du sommeil et autres troubles du sommeil liés à des problèmes respiratoires, narcolepsie), les troubles neurologiques (épilepsie, accident vasculaire cérébral (AVC), traumatisme cranio-cérébral, sclérose en plaques, démence), les troubles psychopathologiques (dépression majeure, dysthymie, troubles de toxicomanie), ainsi que la prise de certains types de médicaments (antipsychotiques, antidépresseurs, benzodiazépines, anxiolytiques) (Billiard 2003, Black et coll. 2005, Happe 2003, Krahn 2005, Pagel 2005). L'apnée du sommeil et la narcolepsie, deux troubles du sommeil répertoriés chez les populations en réadaptation et figurant parmi les causes les plus fréquentes de somnolence sont dépeintes ci-dessous.

L'apnée du sommeil

L'apnée du sommeil fait partie d'une vaste catégorie de troubles du sommeil (troubles respiratoires au cours du sommeil; AASM, 2005) et se caractérise par une altération de la fonction respiratoire au cours du sommeil. Chez les individus atteints d'apnée du sommeil, les arrêts respiratoires sont associés avec l'état d'éveil, une désaturation en oxygène dans le sang. Une forte proportion de la population souffre d'apnées ou d'arrêts respiratoires au cours de la nuit. Cependant, afin d'être considéré anormaux ou pathologiques, le nombre d'épisodes respiratoires doit être égal ou supérieur à cinq l'heure, répondant ainsi aux critères du syndrome d'apnée du sommeil. Le diagnostic de l'apnée du sommeil doit être confirmé au moyen d'enregistrements polysomnographiques pris au cours d'une nuit passée dans un laboratoire du sommeil. La plupart des personnes atteintes d'apnée ne se rendent pas compte de leur problème jusqu'à ce que leur entourage soit témoin d'épisodes d'interruption du débit aérien ou de conséquences diurnes de leur sommeil perturbé. L'apnée du sommeil peut être de nature obstructive (épisodes complets (apnée) ou partiels (hypopnée) d'obstruction des voies aériennes supérieures se produisant au cours du sommeil) ou de nature centrale (insuffisance ventilatoire en raison d'une déficience au niveau du contrôle cérébral de la respiration). La forme la plus commune d'apnée est de loin l'apnée obstructive du sommeil dont l'obésité, le vieillissement et le genre masculin sont les facteurs de risques les plus répertoriés. Une absence de traitement se traduit par plusieurs conséquences négatives, comme un ronflement bruyant, un sommeil agité, de la somnolence diurne excessive et un risque accru de maladies cardiovasculaires, en particulier d'accidents vasculaires cérébraux (AVC).

La narcolepsie

La narcolepsie est un trouble rare du sommeil qui se caractérise par une tétrade classique de symptômes, dont (du plus répandu au moins répandu): la somnolence diurne excessive, la cataplexie (brefs épisodes de perte soudaine du tonus musculaire souvent déclenchés par une réaction émotive), la paralysie du sommeil (incapacité temporaire de parler ou de bouger au réveil) et les hallucinations hypnagogiques (expériences intenses et lucides ressemblant aux rêves qui surviennent au moment de l'endormissement, du sommeil léger ou au réveil). Il est nécessaire d'effectuer des enregistrements polysomnographiques nocturnes et diurnes afin de diagnostiquer la narcolepsie. Bien que la majorité des cas de narcolepsie soient de nature idiopathique, le trouble est souvent secondaire à divers problèmes de santé.

Les troubles du rythme circadien du cycle veille-sommeil

Les troubles du rythme circadien sont caractérisés par un décalage entre le rythme veille-sommeil de l'individu et celui de l'environnement de 24 heures. En d'autres mots, les personnes atteintes de ces troubles ont de la difficulté à suivre les horaires habituels ou souhaités. En plus du cycle veille-sommeil, les rythmes circadiens de la température corporelle et de la sécrétion de mélatonine, une hormone jouant un rôle dans la régulation des rythmes circadiens, sont souvent perturbés. Certaines personnes peuvent présenter un syndrome de retard de phase du sommeil qui se caractérise par un retard dans les épisodes veille-sommeil comparativement aux durées conventionnelles (les heures de coucher et de lever sont décalées de plus de deux heures). Le schéma opposé est appelé syndrome d'avance de phase du sommeil. Enfin, la variante appelée rythme veille-sommeil irrégulier consiste en une importante variabilité dans les heures d'endormissement et de réveil d'un jour à l'autre (Ayalon et coll. 2007).